C’est l’un des facteurs de performance cruciaux dans les sports nordiques. Celui qui fait gagner de précieuses secondes et peut changer une « photo finish ». Le fameux toboggan. Travaillée par des techniciens, elle se retrouve aujourd’hui bouleversée par la nouvelle réglementation fluorure imposée par l’Union européenne. qui a voté pour l’interdiction des produits contenant de l’acide perfluorooctanoïque (PFOA).
La Fédération Internationale de Ski (FIS) et la Fédération Internationale de Biathlon (IBU) ont donc pris l’aspiration, s’alignant sur cette nouvelle loi pour la saison 2021-2022. Mais les deux fédérations sont allées plus loin en interdisant les cires contenant toutes les formes de fluor pour la saison 2022-2023.
« La nouvelle législation m’inquiète »
De précieuses secondes de grappling, mais à quel prix ? C’est cette question largement étudiée qui a poussé les Fédérations vers cette décision radicale. L’APFO, présent dans certaines cires de type « cire » et reconnu comme une « substance extrêmement préoccupante », est désormais répandu dans le corps humain et dans la nature. Ces éléments chimiques reconnus comme perturbateurs endocriniens et nocifs pour la fertilité sont donc présents dans notre sang et dans celui de certaines espèces animales. Ils s’installent et se diffusent à travers différents objets de notre quotidien comme les poêles.
L’exposition des patchs à ces produits semble avoir développé des difficultés respiratoires chez certains d’entre eux. L’entraîneur français Daniel Drezet a même été victime d’un accident vasculaire cérébral qui s’est apparemment déclenché après une séance d’épilation un peu trop longue. Une double peine pour ces techniciens qui travaillent dans l’ombre de la performance sportive et qui se retrouvent donc en première ligne pour affronter les écueils de ces produits miraculeux.
Mais selon un membre du staff de l’équipe de France de ski de fond qui a souhaité garder l’anonymat, les problèmes de santé liés à l’exposition au fluor dans les farts ont été résolus. « Aujourd’hui, nous savons comment nous protéger. Lorsque nous cirons, nous prenons les mesures de protection nécessaires et notre fourgon contient un système de ventilation avancé. Nous utilisons des produits d’entretien des skis, tels que des produits de détartrage, qui sont également nocifs. Mais nous prenons des mesures de protection car ils sont marqués d’un acronyme, donc nous savons qu’ils sont dangereux. Le problème avec la cire, c’est que nous ne le savions pas. «
Fin des farts fluorés bien sûr, mais quels produits sortiront désormais des semelles des skieurs ? Sur ce point règne le flou. « La nouvelle réglementation m’inquiète », a ajouté notre témoin anonyme. « Nous ne connaissons pas les nouvelles cires, donc nous ne savons pas ce qu’elles contiennent, si nous voulons mettre en place des mesures de protection. Si oui, pourquoi? «
Des règlements qui ne semblent pas satisfaire pleinement même les athlètes. «Cette mesure est un peu hypocrite, dit Baptiste Gros, membre de l’équipe nordique de Haute-Savoie et vainqueur d’une manche de Coupe du monde de sprint à Québec en 2016. D’un point de vue environnemental, cela me semble plus efficace. .limiter les transports pour aller aux compétitions ou réduire le nombre de paires de skis remis à chaque athlète.Bien sûr, je pense qu’il faut bouger pour arrêter le fluor, mais pour moi cette mesure n’est pas forcément la bonne solution, surtout parce qu’elle n’est pas contrôlable ». Et c’est le problème principal.
Risque de dopage technique ?
Actuellement, il n’est pas possible de détecter la présence ou l’absence de fluorure sous une semelle de ski. Les protocoles sont actuellement testés, mais leur mise en œuvre semble compromise à court terme.
Les seuls contrôles possibles à l’heure actuelle seraient les fouilles surprises des patrouilles de police dans les fourgons des techniciens pour rechercher des traces de poussière magique. Et cela reste largement limité à scruter les débuts potentiels d’une nouvelle forme de dopage technique. « Ce qui me fait peur, c’est que les mesures de vérification n’existent pas. Si on n’a pas les moyens de vérifier, il y aura sûrement de la tricherie », a déclaré le staff de l’équipe de France. Mais quand on passe au sans fluor, la différence va devenir très importante, surtout sur neige humide ou mouillée. »
Une menace inquiétante de dopage technique pour ce sport déjà victime de cas avérés de dopage physique. « Le moyen le plus simple de résoudre ce problème serait que tous les athlètes soient épilés avec la même chose, au même endroit », suggère Baptiste Gros.
Une idée qui mérite réflexion, et qui pourrait peut-être faire sortir le ski nordique de ce bourbier chimique.
Desseux : « Ce risque de dopage technique est assez préoccupant »
Quels sont les impacts de la nouvelle réglementation au niveau local ? Entretien avec Marc Desseux, directeur du club sportif de la Féclaz.
Cette nouvelle politique fluorure a-t-elle un impact direct sur vous au sein du club ?
« Oui, il y a déjà des impacts étant donné qu’on a des jeunes sur le circuit national et sur des formats longue distance avec des courses que le règlement FIS prend en compte cette saison. C’est donc une vingtaine de jeunes du club et du groupe Féclaz Formation Longue Distance qui sont intéressés ».
Et au niveau des plus petits ?
« Depuis quelques années, il existe une charte appliquée au circuit régional qui limite l’utilisation des cires fluorées. Donc le règlement de cette année ne change rien pour les jeunes qui concourent dans les compétitions locales ».
Avez-vous déjà pu anticiper et amorcer la transition vers le sans fluor ?
« Oui, nous avons commencé à tester de nouvelles cires sans fluor l’année dernière, nous avons donc pu commencer à comprendre ce changement. En revanche, nous n’avons reçu aucune indication en amont pour pouvoir anticiper et modifier nos politiques d’achats. Nous avons donc un stock assez important de farts, aussi bien fluides que grip, à vendre et nous ne savons pas encore si nous pourrons les utiliser lors des entraînements ou si nous devrons les jeter ».
En tant qu’individu et en tant que responsable de club, que pensez-vous de cette disposition ?
« Je pense qu’il y a unanimité pour dire que mettre fin au fluorure est une bonne chose. Ses effets sur l’environnement et la santé ne pouvaient plus être négligés, c’était une étape obligée. Mais d’un autre côté, il existe de nombreux problèmes de mise en œuvre. Il n’y a eu aucune anticipation sur les politiques d’achat et le stock de cires interdites dans tous les clubs représente une somme d’argent suffisamment importante dans toute la Fédération qui est gaspillée. Et puis la loi européenne n’interdit pas la production de cires fluorées qui ne contiennent pas de PFOA. Nous pourrons donc certainement toujours l’obtenir malgré l’interdiction des compétitions. Ce risque de dopage technique est assez préoccupant, d’autant plus qu’il est beaucoup plus simple que le dopage classique, car il ne met pas en danger votre santé. De plus, les compétitions populaires sont des événements où il sera impossible de contrôler les participants car il n’y a aucun contrôle au niveau du club. Le contrôle au cas par cas est impossible ».
Recueilli par OC